• L'Affiche rouge
Louis Aragon
Texte extrait du Roman inachevé
Vous n'avez réclamé la gloire ni les larmes
Ni l'orgue, ni la prière aux agonisants.
Onze ans déjà, que cela passe vite onze ans
Vous vous étiez servi simplement de vos armes
La mort n'éblouit pas les yeux des Partisans.
Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes
Noirs de barbe et de nuit, hirsutes, menaçants
L'affiche qui semblait une tache de sang
Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles
Y cherchait un effet de peur sur les passants...
Nul ne semblait vous voir Français de préférence
Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant
Mais à l'heure du couvre-feu des doigts errants
Avaient écrit sous vos photos : " Morts pour la France ! "
Et les mornes matins en étaient différents.
Tout avait la couleur uniforme du givre
A la fin février et pour vos derniers moments
Et c'est alors que l'un de vous dit calmement :
" Bonheur à tous ! Bonheur à ceux qui vont survivre !
Je meurs sans haine pour le peuple allemand. "
Adieu la peine et le plaisir, adieu les roses,
Adieu la vie, adieu la lumière et le vent
Marie-toi, sois heureuse et pense à moi souvent
Toi qui va demeurer dans la beauté des choses
Quand tout sera fini, plus tard en Erivan
Un grand soleil d'hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le cœur me fend
La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée, ô mon amour, mon orpheline
Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant
Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent
Vingt et trois qui donnaient leur cœur avant le temps
Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient La France en s'abattant.
• Nuit et brouillard
Jean Ferrat
Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers,
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés,
Qui déchiraient la nuit de leurs ongles battants,
Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent.
Ils se croyaient des hommes, n'étaient plus que des nombres :
Depuis longtemps leurs dés avaient été jetés.
Dès que la main retombe il ne reste qu'une ombre,
Ils ne devaient jamais plus revoir un été
La fuite monotone et sans hâte du temps,
Survivre encore un jour, une heure, obstinément
Combien de tours de roues, d'arrêts et de départs
Qui n'en finissent pas de distiller l'espoir.
Ils s'appelaient Jean-Pierre, Natacha ou Samuel,
Certains priaient Jésus, Jéhovah ou Vichnou,
D'autres ne priaient pas, mais qu'importe le ciel,
Ils voulaient simplement ne plus vivre à genoux.
Ils n'arrivaient pas tous à la fin du voyage ;
Ceux qui sont revenus peuvent-ils être heureux ?
Ils essaient d'oublier, étonnés qu'à leur âge
Les veines de leurs bras soient devenus si bleues.
Les Allemands guettaient du haut des miradors,
La lune se taisait comme vous vous taisiez,
En regardant au loin, en regardant dehors,
Votre chair était tendre à leurs chiens policiers.
On me dit à présent que ces mots n'ont plus cours,
Qu'il vaut mieux ne chanter que des chansons d'amour,
Que le sang sèche vite en entrant dans l'histoire,
Et qu'il ne sert à rien de prendre une guitare.
Mais qui donc est de taille à pouvoir m'arrêter ?
L'ombre s'est faite humaine, aujourd'hui c'est l'été,
Je twisterais les mots s'il fallait les twister,
Pour qu'un jour les enfants sachent qui vous étiez.
Vous étiez vingt et cent, vous étiez des milliers,
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés,
Qui déchiriez la nuit de vos ongles battants,
Vous étiez des milliers, vous étiez vingt et cent.
• Lily Marlène
Norbert Schultze, 1938
traduction : Henry Lemarchand, 1940.
Devant la caserne
Quand le jour s'enfuit,
La vieille lanterne
Soudain s'allume et luit.
C'est dans ce coin là que le soir
On s'attendait remplis d'espoir
Tous deux, Lily Marlène.
Et dans la nuit sombre
Nos corps enlacés
Ne faisaient qu'une ombre
Lorsque je t'embrassais.
Nous échangions ingénument
Joue contre joue bien des serments
Tous deux, Lily Marlène.
Le temps passe vite
Lorsque l'on est deux !
Hélas on se quitte
Voici le couvre-feu...
Te souviens-tu de nos regrets
Lorsqu'il fallait nous séparer ?
Dis-moi, Lily Marlène ?
La vieille lanterne
S'allume toujours
Devant la caserne
Lorsque finit le jour
Mais tout me paraît étrange
Aurais-je donc beaucoup changé ?
Dis-moi, Lily Marlène.
Cette tendre histoire
De nos chers vingt ans
Chante en ma mémoire
Malgré les jours, les ans.
Il me semble entendre ton pas
Et je te serre entre mes bras
Lily... Lily Marlène
• Babi Yar
Yevgeni Yevtushenko
Né en 1933 à Sima, dans le gouvernement d'Irkoutsk, Y Yevtushenko, commence à publier ses écrits en 1949 et entre, en 1951, à l'Institut pédagogique Gorki. Son premier livre, Les Éclaireurs, parut à Moscou en 1952.
Babi Yar, près de Kiev où, en 1941, les nazis ont massacré 90.000 juifs.
Il n'est à Babi Yar sur
tant et tant de tombes
Pas d'autres monuments que ce triste ravin.
J'ai peur... Quel poids ici sur mes épaules tombe !
Ô peuple juif, vraiment, j'ai ton âge soudain.
Je me vois en Égypte errer aux temps
antiques...
Je me vois expirer cloué sur une croix ;
Désormais j'appartiens à la race hébraïque
Et ces marques de clous je les porte sur moi.
Me voici devenu Dreyfus, le capitaine,
Et le petit bourgeois me juge, accusateur,
Derrière les barreaux, pris au piège des haines,
Couvert par les crachats ignobles des menteurs.
Petites femmes, vous, aux volants de
dentelles,
Glapissant vous pointez sur mon front vos ombrelles...
À Biélostok, je suis l'enfant saigné à blanc,
Et mon sang a rougi les pensées en coulant.
Ton âme, ô peuple russe, est internationale ;
Je hais leur imposture à ces vils houligans,
Eux qui voudraient saisir, Russie, dans leurs mains sales
Ton nom sacré, ton nom, pour en faire un slogan ! ...
Devenant Anna Franck, pure comme une
tige
D'avril, sans phrases j'aime, échangeant des regards...
C'est tout... Pas de feuillages et pas de ciel, que dis-je,
À peine est-il de respirer, de voir...
C'est peu... mais c'est beaucoup, car voici notre
étreinte
Si tendre dans la pièce en son obscurité...
On vient ! Quels sont ces pas ? Mais non, reste sans crainte,
Ce n'est que le printemps qui vient nous visiter...
Fais vite ! Donne-moi tes lèvres, ton
visage,
On enfonce la porte... ô non, c'est le dégel...
À Babi Yar j'entends ce soir l'herbe sauvage,
Je vois les arbres tels des juges solennels.
Tout crie et crie ici dans le poignant silence
Et je me sens blanchir dans ce morne décor,
En devenant moi-même un cri muet, immense,
Un cri sur des milliers et des milliers de morts.
Je suis chaque vieillard qui tomba sous
les balles,
Et je suis chaque enfant fusillé dans ces lieux...
Qu'un jour au grondement de l'Internationale
L'ultime antisémite aille chez ses aïeux ! ...
Je n'ai pas de sang juif, que je sache, en
mes veines,
Mais que je sois haï comme si j'étais juif,
Par chaque antisémite en sa démente haine ;
Tel est mon vœu de Russe, et russe est son motif...
• Courage (1942)
Paul Eluard
Paris a froid Paris a faim
Paris ne mange plus de marrons dans la rue
Paris a mis de vieux vêtements de vieille
Paris dort tout debout sans air dans le métro
Plus de malheur encore est imposé aux pauvres
Et la sagesse et la folie
De Paris malheureux
C'est l'air pur c'est le feu
C'est la beauté c'est la bonté
De ses travailleurs affamés
Ne crie pas au secours Paris
Tu es vivant d'une vie sans égale
Et derrière la nudité
De ta pâleur de ta maigreur
Tout ce qui est humain se révèle en tes yeux
Paris ma belle ville
Fine comme une aiguille forte comme un épée
Ingénue et savante
Tu ne supportes pas l'injustice
Pour toi c'est le seul désordre
Tu vas le libérer Paris
Paris tremblant comme une étoile
Notre espoir survivant
Tu vas te libérer de la fatigue et la boue
Frères ayons du courage
Nous qui ne sommes pas casqués
Ni bottés ni gantés ni bien élevés
Un rayon s'allume en nos veines
Notre lumière nous revient
Les meilleurs d'entre nous sont morts pour nous
Et voici que leur sang retrouve notre cœur
Et c'est de nouveau le matin un matin de Paris
La pointe de la délivrance
L'espace du printemps naissant
La force idiote a le dessous
Ces esclaves nos ennemis
S'ils ont compris
S'ils sont capables de comprendre
Vont se lever.
• Poème écrit à Dachau et
attribué au Pasteur Martin Niemöller
Quand ils sont venus
chercher les communistes
je n'ai rien dit
Je n'étais pas communiste.
Quand ils sont venus
chercher les syndicalistes
je n'ai rien dit
Je n'étais pas syndicaliste.
Quand ils sont venus
chercher les juifs
je n'ai rien dit
Je n'étais pas juif.
Quand ils sont venus
chercher les catholiques
je n'ai rien dit
Je n'étais pas catholique.
Puis ils sont venus me chercher
Et il ne restait plus personne pour
protester.
• Liberté
Paul Eluard (1895-1952)
Poésies et vérités, 1942
Sur mes cahiers d'écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable de neige
J'écris ton nom
Sur les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J'écris ton nom
Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J'écris ton nom
Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l'écho de mon enfance
J'écris ton nom
Sur tous mes chiffons d'azur
Sur l'étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J'écris ton nom
Sur les champs sur l'horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J'écris ton nom
Sur chaque bouffées d'aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J'écris ton nom
Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l'orage
Sur la pluie épaisse et fade
J'écris ton nom
Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J'écris ton nom
Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J'écris ton nom
Sur la lampe qui s'allume
Sur la lampe qui s'éteint
Sur mes raisons réunies
J'écris ton nom
Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J'écris ton nom
Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J'écris ton nom
Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J'écris ton nom
Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J'écris ton nom
Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attendries
Bien au-dessus du silence
J'écris ton nom
Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J'écris ton nom
Sur l'absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J'écris ton nom
Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l'espoir sans souvenir
J'écris ton nom
Et par le pouvoir d'un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer
• Complainte du partisan
Emmanuel d'Astier de La Vigerie
Les Allemands étaient chez moi
On m'a dit résigne toi
Mais je n'ai pas pu
Et j'ai repris mon arme.
Personne ne m'a demandé
D'où je viens et où je vais
Vous qui le savez
Effacez mon passage.
J'ai changé cent fois de nom
J'ai perdu femme et enfants
Mais j'ai tant d'amis
Et j'ai la France entière.
Un vieil homme dans un grenier
Pour la nuit nous a cachés
Les Allemands l'ont pris
Il est mort sans surprise.
Hier encore nous étions trois
Il ne reste plus que moi
Et je tourne en rond
Dans la prison des frontières.
Le vent souffle sur les tombes
La liberté reviendra
On nous oubliera
Nous rentrerons dans l'ombre.
•
Morts les enfants
Renaud Séchan, 1985
Musique : Franck Langolf
Chiffon imbibé d'essence
un enfant meurt en silence
sur le trottoir de Bogota
on ne s'arrête pas
Déchiquetés au champ de mines
décimés aux premières lignes
morts les enfants de la guerre
pour les idées de leurs pères
Bal à l'ambassade
quelques vieux malades
imbéciles et grabataires
se partagent l'univers
Morts les enfants de Bhopal
d'industrie occidentale
partis dans les eaux du Gange
les avocats s'arrangent
Morts les enfants de la haine
près de nous ou plus lointaine
morts les enfants de la peur
chevrotine dans le cœur
Bal à l'ambassade
quelques vieux malades
imbéciles et militaires
se partagent l'univers
Morts les enfants du Sahel
on accuse le soleil
morts les enfants de Seveso
morts les arbres, les oiseaux
Morts les enfants de la route
dernier week-end du mois d'août
papa picolait sans doute
deux ou trois verres, quelques gouttes
Bal à l'ambassade
quelques vieux malades
imbéciles et tortionnaires
se partagent l'univers
Mort l'enfant qui vivait en moi
qui voyait en ce monde-là
un jardin, une rivière
et des hommes plutôt frères
Le jardin est une jungle
les hommes sont devenus dingues
la rivière charrie des larmes
un jour l'enfant prend une arme
Balles sur l'ambassade
attentat, grenade
hécatombe au ministère
sous les gravats, les grabataires
Oradour n'a plus de femmes
Oradour n'a plus un homme
Oradour n'a plus de feuilles
Oradour n'a plus de pierres
Oradour n'a plus d'église
Oradour n'a plus d'enfants
Plus de fumée plus de rires
Plus de toits plus de greniers
Plus de meules plus d'amour
Plus de vin plus de chansons.
Oradour, j'ai peur d'entendre
Oradour, je n'ose pas
Approcher de tes blessures
De ton sang de tes ruines,
je ne peux je ne peux pas
Voir ni entendre ton nom.
Oradour je crie et hurle
Chaque fois qu'un cœur éclate
Sous les coups des assassins
Une tête épouvantée
Deux yeux larges deux yeux rouges
Deux yeux graves deux yeux grands
Comme la nuit la folie
Deux yeux de petits enfants:
Ils ne me quitteront pas.
Oradour je n'ose plus
Lire ou prononcer ton nom.
Oradour honte des hommes
Oradour honte éternelle
Nos cœurs ne s'apaiseront
Que par la pire vengeance
Haine et honte pour toujours.
Oradour n'a plus de forme
Oradour, femmes ni hommes
Oradour n'a plus d'enfants
Oradour n'a plus de feuilles
Oradour n'a plus d'église
Plus de fumées plus de filles
Plus de soirs ni de matins
Plus de pleurs ni de chansons.
Oradour n'est plus qu'un cri
Et c'est bien la pire offense
Au village qui vivait
Et c'est bien la pire honte
Que de n'être plus qu'un cri,
Nom de la haine des hommes
Nom de la honte des hommes
Le nom de notre vengeance
Qu'à travers toutes nos terres
On écoute en frissonnant,
Une bouche sans personne,
Qui hurle pour tous les temps.
• La bête est revenue (1998)
Pierre Perret
Sait-on pourquoi, un matin,
Cette bête s'est réveillée
Au milieu de Pantin
Qu'elle a tous émerveillé
En proclamant partout, haut et fort :
" Nous mettrons l'étranger dehors "
Puis cette ogresse aguicheuse
Fit des clones imitatifs.
Leurs tirades insidieuses
Convainquirent les naïfs
Qu'en suivant leurs dictats xénophobes,
On chasserait tous les microbes.
Attention mon ami, je l'ai vue.
Méfie-toi : la bête est revenue !
C'est une hydre au discours enjôleur
Qui forge une nouvelle race d'oppresseurs.
Y'a nos libertés sous sa botte.
Ami, ne l'ouvre pas, ta porte.
D'où cette bête a surgi,
Le ventre est encore fécond.
Bertold Brecht nous l'a dit.
Il connaissait la chanson.
Celle qu'Hitler a tant aimé,
C'est la valse des croix gammées
Car, pour gagner quelques voix
Des nostalgiques de Pétain,
C'est les juifs, encore une fois,
Que ces dangereux aryens
Brandiront comme un épouvantail
Dans tous leurs sinistres éventails.
Attention mon ami, je l'ai vue.
Méfie-toi : la bête est revenue !
C'est une hydre au discours enjôleur
Qui forge une nouvelle race d'oppresseurs.
Y'a nos libertés sous sa botte.
Ami, ne l'ouvre pas, ta porte.
N'écoutez plus, braves gens,
Ce fléau du genre humain,
L'aboiement écœurant
De cette bête à chagrin
Instillant par ces chants de sirènes
La xénophobie et la haine.
Laissons le soin aux lessives
De laver plus blanc que blanc.
Les couleurs enjolivent
L'univers si différent.
Refusons d'entrer dans cette ronde
Qui promet le meilleur des mondes.
Attention mon ami, je l'ai vue.
Méfie-toi : la bête est revenue !
C'est une hydre au discours enjôleur
Dont les cent mille bouches crachent le malheur.
Y'a nos libertés sous sa botte.
Ami, ne l'ouvre pas, ta porte
Car, vois-tu, petit, je l'ai vue,
La bête. La bête est revenue.
• Lili
Pierre Perret
On la trouvait plutôt jolie, Lili
Elle arrivait des Somalies, Lili
Dans un bateau plein d'émigrés
Qui venaient tous de leur plein gré
Vider les poubelles à Paris
Elle croyait qu'on était égaux, Lili
Au pays d' Voltaire et d'Hugo, Lili
Mais pour Debussy, en revanche
Il faut deux noires pour une blanche
Ça fait un sacré distinguo !
Elle aimait tant la liberté, Lili
Elle rêvait de fraternité, Lili
Un hôtelier, rue Secrétan,
Lui a précisé en arrivant
Qu'on ne recevait que des blancs
Elle a déchargé les cageots, Lili
Elle s'est tapé les sales boulots, Lili
Elle crie pour vendre les choux-fleurs
Dans la rue ses frères de couleur
L'accompagnent au marteau-piqueur.
Et quand on l'appelait Blanche-neige, Lili
Elle ne se laissait plus prendre au piège, Lili
Elle trouvait ça très amusant
Même s'il fallait serrer les dents...
Ils auraient été trop contents !
Elle aima un beau blond frisé, Lili
Qui était tout prêt à l'épouser, Lili
Mais la belle-famille lui dit : "Nous
N' sommes pas racistes pour deux sous,
Mais on (ne) veut pas de ça chez nous..."
Elle a essayé l'Amérique, Lili
Ce grand pays démocratique, Lili
Elle (n')aurait pas cru sans le voir
Que la couleur du désespoir
Là-bas aussi ce fût le noir.
Mais dans un meeting à Memphis, Lili
Elle a vu Angela Davis, Lili
Qui lui dit " Viens, ma petite sœur,
En s'unissant on a moins peur
Des loups qui guettent le trappeur. "
Et c'est pour conjurer sa peur, Lili
Qu'elle lève aussi un poing rageur, Lili
Au milieu de tous ces gugusses
Qui foutent le feu aux autobus
Interdits aux gens de couleur.
Mais dans ton combat quotidien, Lili
Tu connaîtras un type bien, Lili
Et l'enfant qui naîtra un jour
Aura la couleur de l'amour
Contre laquelle on ne peut rien.
• On ira pendr' notre linge sur la lign'
Siegfried
Parole et musique : Jimmy Kennedy
& Michael Carr, 1939
Adaptation française : Paul Misraki
1939
Un petit Tommy chantait cet air plein d'entrain
En arrivant au camp.
Tous les p'tits poilus joyeux apprirent le refrain
Et bientôt le régiment
Entonnait gaiement :
On ira pendr' notre linge sur la lign' Siegfried,
À nous le beau linge blanc,
Les napp's à fleurs et les ch'mis's à papa.
En famille on lavera tout ça.
On ira pendr' notre linge sur la lign'Siegfried
Si on le trouve encore là.
Tout le monde à son boulot en met
un bon coup
Avec un cœur joyeux.
On dit que le colonel est très content de nous
Et tant pis pour les envieux !
Tout va pour le mieux
• J'ai froid
Jean Ferrat
Le vent du midi s'abat en rafales
Sur la vallée noire où les arbres ploient
Leurs bras désolés fument des gitanes
J'ai froid
Une fois de plus tous les droits de l'homme
Sont foulés aux pieds sont jetés à bas
Les maîtres sanglés dans leurs uniformes
J'ai froid
Une fois de plus la grande injustice
La force imbécile triomphe du droit
Quand la liberté tombe sa pelisse
J'ai froid
Encore une fois les lettres anonymes
La bêtise épaisse en guise de loi
La salve éclatant au milieu de l'hymne
J'ai froid
Si la bête immonde sort de sa tanière
Nous retrouverons le chemin des bois
Mets dans ma valise un gros pull-over
J'ai froid
Dans tes yeux soudain ivres de colère
La révolte éclaire un grand feu de bois
Quand fera-t-il donc le tour de la terre
J'ai froid
Quand fera-t-il donc le tour de la terre
J'ai froid
• Mai 40
Jacques Brel
On jouait un air comme celui-ci
Lorsque la guerre s'est réveillée,
On jouait un air comme celui-ci
Lorsque la guerre est arrivée
Moi de mes onze ans d'altitude,
Je découvrais éberlué
Des soldatesques fatiguées
Qui ramenaient ma belgitude
Les hommes devenaient des hommes,
Les gares avalaient des soldats
Qui faisaient ceux qui ne s'en vont pas
Et les femmes,
Les femmes s'accrochaient à leurs hommes
Et voila que le printemps flambe,
Les canons passaient en chantant
Et puis les voila revenant
Déjà la gueule entre les jambes,
Comme repassaient en pleurant
Nos grands frères devenus vieillards,
Nos pères devenus brouillards
Et les femmes,
Les femmes s'accrochaient aux enfants
Je découvris le réfugié,
C'est un paysan qui se nomade,
C'est un banlieusard qui s'évade
D'une ville ouverte qui est fermée
Je découvris le refusé,
C'est un armé que l'on désarme
Et qui doit faire chemin à pied
Et les femmes,
Les femmes s'accrochaient à leurs larmes
D'un ciel plus bleu qu'à l'habitude,
Ce mai 40 a salué
Quelques allemands disciplinés
Qui écrasaient ma belgitude,
L'honneur avait perdu patience,
Et chaque bourg connut la crainte,
Et chaque ville fut éteinte
Et les femmes,
Les femmes s'accrochèrent au silence.
• Jacques Hélian
Fleur de Paris
Texte : Maurice Vandair, Musique : Henri Bourtayre
© 1944
Mon épicier l'avait gardée dans son comptoir
Le percepteur la conservait dans son tiroir
La fleur si belle de notre espoir
Le pharmacien la dorlotait dans un bocal
L'ex-caporal en parlait à l'ex-général
Car c'était elle, notre idéal.
C'est une fleur de Paris
Du vieux Paris qui sourit
Car c'est la fleur du retour
Du retour des beaux jours
Pendant quatre ans dans nos cœurs
Elle a gardé ses couleurs
Bleu, blanc, rouge, avec l'espoir elle a fleuri,
Fleur de Paris
Le paysan la voyait fleurir dans ses champs
Le vieux curé l'adorait dans un ciel tout blanc
Fleur d'espérance
Fleur de bonheur
Tout ceux qui se sont battus pour nos libertés
Au petit jour devant leurs yeux l'ont vu briller
La fleur de France
Aux trois couleurs.
C'est une fleur de chez nous
Elle a fleuri de partout
Car c'est la fleur du retour
Du retour des beaux jours
Pendant quatre ans dans nos cœurs
Elle a gardé ses couleurs
Bleu, blanc, rouge, elle était vraiment avant tout
Fleur de chez nous.
• La marseillaise de la paix
(parodie publiée en 1892 dans l'almanach de la Paix), reproduite dans " Non à la guerre, disent-elles " par Odette Thibault. Texte
anonyme.
De l'universelle patrie
Puisse venir le jour rêvé
De la paix, de la paix chérie
Le rameau sauveur est levé ! (bis)
On entendra vers les frontières,
Les peuples, se tendant les bras,
Crier : Il n'est plus de soldats !
Soyons unis, nous sommes frères !
refrain
Plus d'armes, citoyens !
Rompez vos bataillons !
Chantez, chantons !
Et que la Paix
féconde nos sillons !
Debout ! Pacifiques cohortes !
Hommes des champs et des cités,
Avec transport, ouvrez vos portes
Aux trésors, fruits des libertés (bis)
Que le fer déchire la terre,
Et, pour ce combat tout d'amour,
En nobles outils de labour
Reforgeons les armes de guerre.
refrain
Plus d'armes, citoyens !
Rompez vos bataillons !
Chantez, chantons !
Et que la Paix
féconde nos sillons !
En traits de feu par vous lancée,
Artistes, poètes, savants,
Répandez partout la pensée.
L'avenir vous voit triomphants (bis)
Allez, brisez le vieux servage,
Inspirez nous l'effort vainqueur
Pour la conquête du bonheur ;
Ce sont les lauriers de notre âge.
refrain
Plus d'armes, citoyens !
Rompez vos bataillons !
Chantez, chantons !
Et que la Paix
féconde nos sillons !
• Le Chant des marais
Oeuvre collective : Johann Esser, Wolfang Langhoff, Rudi Goguel.
Ce chant est né, vers les années 1933, au camp de concentration de Bögermoor
où les nazis enfermaient les premiers résistants allemands. Musique de Rudy GOGUEL...
Loin dans l'infini s'étendent
De grands prés marécageux
Pas un seul oiseau ne chante
Sur les arbres secs et creux
Oh ! Terre de détresse
Où nous devons sans cesse
Piocher.
Dans ce camp morne et sauvage
Entouré d'un mur de fer
Il nous semble vivre en cage
Au milieu d'un grand désert.
Bruit des pas et bruit des armes
Sentinelles jours et nuits
Et du sang, des cris, des larmes
La mort pour celui qui fuit.
Mais un jour dans notre vie
Le printemps refleurira
Liberté, Liberté chérie
Je dirai : Tu es à moi.
Oh ! Terre enfin libre
Où nous pourrons revivre (bis)
Aimer, Aimer.
• André Dassary
Maréchal, nous voilà !
A.Montagard. A.Montagard, C.Courtioux 1941
Une flamme sacrée
Monte du sol natal
Et la France enivrée
Te salue Maréchal !
Tous tes enfants qui t'aiment
Et vénèrent tes ans
A ton appel suprême
Ont répondu " Présent "
Maréchal nous voilà !
Devant toi, le sauveur de la France
Nous jurons, nous, tes gars
De servir et de suivre tes pas
Maréchal nous voilà !
Tu nous as redonné l'espérance
La Patrie renaîtra !
Maréchal, Maréchal, nous voilà !
Tu as lutté sans cesse
Pour le salut commun
On parle avec tendresse
Du héros de Verdun
En nous donnant ta vie
Ton génie et ta foi
Tu sauves la Patrie
Une seconde fois :
Quand ta voix nous répète
Afin de nous unir :
" Français levons la tête,
Regardons l'avenir ! "
Nous, brandissant la toile
Du drapeau immortel,
Dans l'or de tes étoiles,
Nous voyons luire un ciel :
La guerre est inhumaine
Quel triste épouvantail !
N'écoutons plus la haine
Exaltons le travail
Et gardons confiance
Dans un nouveau destin
Car Pétain, c'est la France,
La France, c'est Pétain !
• POèME D'UN NOIR pour son
homologue blanc
Cher frère blanc
Quand je suis né, j'étais noir
Quand j'ai grandi, j'étais noir
Quand je vais au soleil, je suis noir
Quand j'ai peur, je suis noir
Quand je suis malade, je suis noir.
TANDIS QUE TOI HOMME BLANC
Quand tu est né, tu étais rose
Quand tu as grandi, tu étais blanc
Quand tu vas au soleil, tu est rouge
Quand tu as froid, tu est bleu
Quand tu as peur, tu est vert
Quand tu est malade, tu est jaune
Quand tu mourra, tu sera gris.
Après ça, tu a le toupet de m'appeler :
" Homme de couleur ".
• La complainte de ceux qui vont combattre.
Edmond Rostand.
10 mai
Voilà mille jours qu'on se bat.
Mille fois que le jour est né.
Mille fois qu'ils ont frissonné !
Les fins de nuit sont le moment
Du plus mauvais frissonnement.
Elle est allemande, la nuit.
Car, en s'enfuyant, elle nuit.
Elle jette un poison d'effroi
Dans le puits bleu du matin froid.
Le petit frisson auroral
Est le plus grand frisson moral.
L'Homme, à trois heures du matin,
Doute toujours de son destin.
Un cœur n'est plus rouge mais gris,
Quand l'Aube, entre ses doigts, l'a pris.
Doigts de rose ? parlons sans fard :
Elle a des pattes de cafard.
Quiconque a mal dormi le sait.
Mais pour eux songez ce que c'est,
Ce réveil avec ce frisson,
Et quand ils revoient ce qu'ils sont !
C'est l'heure où l'on sort de son trou
La bouche amère et le cœur mou.
Pour souffrir ce qu'on a souffert,
On remet son chapeau de fer.
Des hommes passent, lourds, pliés,
Et la route est sans peupliers.
Primo Levi
Si c'est un homme
Vous qui vivez en toute quiétude
Bien au chaud dans vos maisons
Vous qui trouvez le soir en rentrant
La table mise et des visages amis
Considérez si c'est un homme
Que celui qui peine dans la boue,
Qui ne connaît pas de repos,
Qui se bat pour un quignon de pain,
Qui meurt pour un oui pour un non.
Considérez si c'est une femme
Que celle qui a perdu son nom et ses cheveux
Et jusqu'à la force de se souvenir,
Les yeux vides et le sein froid
Comme une grenouille en hiver.
N'oubliez pas que cela fut,
Non, ne l'oubliez pas:
Gravez ces mots dans votre cœur.
Pensez-y chez vous, dans la rue,
En vous couchant, en vous levant ;
Répétez-les à vos enfants.
OU que votre maison s'écroule ;
Que la maladie vous accable,
Que vos enfants se détournent de vous.
La
démocratie du coucou
Recueilli par Louise Michel (1878-1884)
Nous
vivions paisiblement dans une maison entourée d'un jardin fertile ; sur une
partie caillouteuse, éloignée de la maison, une cabane où nous remisions les
outils.
Un jour, deux étrangers frappèrent à notre porte. Comme de coutume nous
offrîmes l'hospitalité.
Dès le lendemain, ils nous réunirent et déclarèrent : " nous vivrons
désormais ici. " Ils avaient des armes à la main, nous dûmes nous
soumettre. Quelque temps après, un des nôtres protesta contre l'intrusion. Ils
le tuèrent. Ils firent venir des leurs, prirent pour domestiques des hommes
d'une île voisine.
Alors, ils nous expliquèrent : " la cohabitation n'est plus souhaitable,
vous ne vivez pas comme nous, et de toute façon la maison n'est pas assez
grande... La cabane, au fond du jardin, reste inutilisée, vous vous y
installerez ! "
Plusieurs années s'écoulèrent. Nous décidâmes de ne plus supporter cette
situation.
Nous allâmes réclamer justice auprès des autorités du pays. " Qu'à cela
ne tienne, nous répondit-on, nous organiserons un vote de tous les résidents
de ce domaine... "
La voix du pouvoir ajouta : " ... un vote dans le respect de la démocratie
: un homme, une voix. "
Dans la cabane, avec les enfants, nous étions 7. Dans la maison, avec les
domestiques, ils étaient dix.
Nous étions, nous sommes kanaks.
Dans cette langue, aux mots pour nous étranges, kanak signifie homme. C'est pourquoi, qui se veut respectueux des autres, au pays de cette langue, peut, pourra, devenir kanak.
Imagine
John Lennon
Imagine
que le ciel n'existe pas
C'est facile si tu penses qu'
Aucun enfer n'existe au-dessous
Au-dessus de nous, seulement le ciel
Imagine tous les peuples,
Vivre dans un tel présent...
Imagine
qu'il n'y a aucun pays
Il est difficile de faire quelque chose
Pour détruire ou mourir
De même pour les religions
Imagine que tout le monde
Vive dans la paix...
Vous
pouvez dire que je suis un rêveur
Mais je ne suis pas le seul
J'espère qu'un jour vous me rejoindrez
Et le monde ne fera qu'un
N'imagine
aucune possession
Je m'émerveillerais si chacun pouvait
N'avoir soif ni de pouvoir ni de biens
Ce serait la confrérie de l'homme
Imagine alors tous les gens
Se partager le monde...
Vous
pouvez dire que je suis un rêveur
Mais je ne suis pas le seul
J'espère qu'un jour vous me rejoindrez
Et le monde ne fera qu'un.
Né
en 17 à Leidenstadt
Jean-Jacques Goldman
Et si j'étais né en 17 à Leidenstadt
Sur les ruines d'un champ de bataille
Aurais-je été meilleur ou pire que ces gens
Si j'avais été allemand ?
Bercé d'humiliation, de haine et d'ignorance
Nourri de rêves de revanche
Aurais-je été de ces improbables consciences
Larmes au milieu d'un torrent
Si j'avais grandi dans les docklands de Belfast
Soldat d'une foi, d'une caste
Aurais-je eu la force envers et contre les miens
De trahir : tendre une main
Si j'étais née blanche et riche à Johannesburg
Entre le pouvoir et la peur
Aurais-je entendu ces cris portés par le vent
Rien ne sera comme avant
On saura jamais c'qu'on a vraiment dans nos ventres
Caché derrière nos apparences
L'âme d'un brave ou d'un complice ou d'un bourreau ?
Ou le pire ou plus beau ?
Serions-nous de ceux qui résistent ou bien les moutons d'un troupeau
S'il fallait plus que des mots ?
Et si j'étais né en 17 à Leidenstadt
Sur les ruines d'un champ de bataille
Aurais-je été meilleur ou pire que ces gens
Si j'avais été allemand ?
Et qu'on nous épargne à toi et moi si possible très longtemps
D'avoir à choisir un camp.
(Auteur inconnu)
Ta
pizza est italienne
et ton couscous algérien.
Ta démocratie est grecque.
Ton café est brésilien.
Ta montre est suisse.
Ta chemise est hawaiienne.
Ton baladeur est coréen.
Tes vacances sont turques,
tunisiennes ou marocaines.
Tes chiffres sont arabes.
Ton écriture est latine.
Ton Christ est juif.
...
Et tu reproches à ton voisin d'être un étranger ! ?
Quand un soldat..
Francis Lemarque (1952)
Fleur au fusil, tambour battant, il va
Il a vingt ans, un cœur d'amant qui bat
Un adjudant pour surveiller ses pas
Et son barda contre son flanc qui bat.
Quand un soldat s'en va-t-en guerre, il a
Dans sa musette un bâton d' maréchal
Quand un soldat revient de guerre, il a
Dans sa musette un peu de linge sale.
Partir pour mourir un peu, à la guerre, à la guerre
C'est un drôl' de petit jeu qui n' va guère aux
amoureux.
Pourtant c'est presque toujours
Quand revient l'été qu'il faut s'en aller
Le ciel regarde partir
Ceux qui vont mourir, au pas cadencé.
Des hommes il en faut toujours, car la guerre, car la
guerre
Se fout des serments d'amour, elle n'aime que l' son
du tambour.
Quand un soldat s'en va-t-en guerre, il a
Des tas d' chansons et des fleurs sous ses pas
Quand un soldat revient de guerre, il a
Simplement eu d' la veine et puis voilà.
Le Déserteur
Boris Vian, 1954
Monsieur le Président
Je vous fais une lettre
Que vous lirez peut-être
Si vous avez le temps
Je viens de recevoir
Mes papiers militaires
Pour partir à la guerre
Avant mercredi soir
Monsieur le Président
Je ne veux pas la faire
Je ne suis pas sur terre
Pour tuer des pauvres gens
C'est pas pour vous fâcher
Il faut que je vous dise
Ma décision est prise
Je m'en vais déserter
Depuis que je suis né
J'ai vu mourir mon père
J'ai vu partir mes frères
Et pleurer mes enfants
Ma mère a tant souffert
Elle est dedans sa tombe
Et se moque des bombes
Et se moque des vers
Quand j'étais prisonnier
On m'a volé ma femme
On m'a volé mon âme
Et tout mon cher passé
Demain de bon matin
Je fermerai ma porte
Au nez des années mortes
J'irai sur les chemins
Je mendierai ma vie
Sur les routes de France
De Bretagne en Provence
Et je dirai aux gens :
Refusez d'obéir
Refusez de la faire
N'allez pas à la guerre
Refusez de partir
S'il faut donner son sang
Allez donner le vôtre
Vous êtes bon apôtre
Monsieur le Président
Si vous me poursuivez
Prévenez vos gendarmes
Que je n'aurai pas d'armes
Et qu'ils pourront tirer
" Ça fait d'excellents français "
Chanson de G.van Parys et J.Boyer chantée par Maurice
Chevalier, 1939.
Le colonel était dans la finance,
Le commandant était dans l'industrie,
Le capitaine était dans l'assurance,
Et le lieutenant était dans l'épicerie.
Le juteux était huissier de la banque de France,
Le sergent était boulanger-patissier,
Le caporal était dans l'ignorance
Et le 2e classe était rentier.
Et tout ça, ça fait
D'excellents Français,
D'excellents soldats,
Qui marchent au pas.
Ils n'en avaient plus l'habitude
Mais c'est comme la bicyclette ça s'oublie pas.
Et tous ces gaillards,
Qui pour la plupart,
Ont des gosses qu'ont leur certificat d'étude,
Oui tous ces braves gens
Sont partis chiquement,
Pour faire tout comme jadis
C'que leurs pères ont fait pour leurs fils.
Le colonel avait de l'albumine,
Le commandant souffrait du gros colon,
Le capitaine avait bien mauvaise mine,
Et le lieutenant avait des ganglions.
Le juteux avait des coliques néphrétiques,
Le sergent avait le pilor atrophié,
Le caporal un cor isachronique
Et le 2e classe des cors aux pieds.
Et tout ça, ça fait
D'excellents Français,
D'excellents soldats,
Qui marchent au pas.
Oubliant dans cette aventure,
Qu'ils étaient douillets, fragiles et délicats.
Et tous ces gaillards,
Qui pour la plupart,
Prenaient des cachets, des gouttes et des mixtures,
Les v'là bien portants,
Tout comme à vingt ans.
D'où vient ce miracle là ?
Mais du pinard et du tabac !
Le colonel était de l'Action française,
Le commandant était un modéré,
Le capitaine était pour le diocèse,
Et le lieutenant boulottait du curé.
Le juteux était un fervent extrémiste,
Le sergent un socialiste convaincu,
Le caporal, inscrit sur toutes les listes,
Et le 2e classe au PMU !
Et tout ça, ça fait
D'excellents Français,
D'excellents soldats,
Qui marchent au pas.
En pensant que la République,
C'est encore le meilleur régime ici bas.
Et tous ces gaillards,
Qui pour la plupart,
N'étaient pas du même avis en politique,
Les v'là tous d'accord,
Quel que soit leur sort,
Ils désirent tous désormais,
Qu'on nous foute une bonne fois la paix !
• La ronde
Paul Fort, Ballades françaises, Flammarion, 1984.
Si toutes les filles du monde voulaient s'donner la main,
tout autour de la mer elles pourraient faire une ronde.
Si tous les gars du monde voulaient bien êtr'marins,
ils f'raient avec leurs barques un joli pont sur l'onde.
Alors on pourrait faire une ronde autour du monde,
si tous les gens du monde voulaient s'donner la main.
• Le Chant du départ (17 juin 1794)
paroles de Jean-Marie Chenier, musique de Méhul
Un député du peuple
La Victoire, en chantant nous ouvre la carrière,
Liberté guide nos pas ;
Et, du nord au midi, la trompette guerrière
A sonné l'heure des combats.
Tremblez ennemis de la France,
Rois ivres de sang et d'orgueil
Le peuple souverain s'avance,
Tyrans, descendez au cercueil.
La République nous appelle,
Sachons vaincre, ou sachons périr :
Un Français doit vivre pour elle,
Pour elle, un Français doit mourir.
CHOEUR DES GUERRIERS
La République,...
UNE MÈRE DE FAMILLE.
De nos yeux maternels ne craignez point les larmes ;
Loin de nous de lâches douleurs !
Nous devons triompher, quand vous prenez les armes,
C'est aux rois à verser des pleurs.
Nous vous avons donné la vie,
Guerriers, elle n'est plus à vous
Tous vos jours sont à la Patrie;
Elle est votre mère avant nous.
CHOEUR DES MÈRES DE FAMILLE.
La République,...
DEUX VIEILLARDS.
Que le fer paternel arme la main des braves ;
Songez à nous aux champs de Mars.
Consacrez dans le sang des rois et des esclaves
Le fer béni par vos vieillards ;
Et, rapportant sous la chaumière,
Des blessures et des vertus,
Venez fermer notre paupière,
Quand les tyrans ne seront plus.
CHOEUR DES VIEILLARDS.
La République,...
UN ENFANT.
De Barra, de Viala, le sort nous fait envie;
Ils sont morts , mais ils ont vaincu ;
Le lâche accablé d'ans n'a point connu le vie ;
Qui meurt pour le peuple a vécu.
Vous êtes vaillants, nous le sommes
Guidez-nous contre les tyrans ;
Les Républicains sont des hommes ;
Les esclaves sont des enfants.
CHOEUR DES ENFANTS.
La République,...
Une épouse
Partez, vaillants époux, les combats sont vos fêtes,
Partez, modèles des guerriers;
Nous cueillerons des fleurs pour en ceindre vos têtes
Nos mains tresseront vos lauriers.
Et si le temple de mémoire
S'ouvrait à vos mânes vainqueurs,
Nos voix chanteront votre gloire,
Nos flancs porteront vos vengeurs.
CHOEUR DES EPOUSES.
La République,...
UNE JEUNE FILLE.
Et nous, soeurs des héros, nous qui de l'hyménée
Ignorons les aimables noeuds,
Si, pour s'unir un jour à notre destinée,
Les Citoyens forment des voeux,
Qu'ils reviennent dans nos murailles,
Beaux de gloire et de liberté,
Et que leur sang, dans les batailles,
Ait coulé pour l'égalité !
CHOEUR DES JEUNES FILLES.
La République,...
TROIS GUERRIERS.
Sur ce fer, devant Dieu, nous jurons à nos pères,
A nos épouses, à nos soeurs,
A nos représentants, à nos fils, à nos mères,
D'anéantir les oppresseurs.
En tous lieux, dans la nuit profonde
Plongeant l'infâme royauté,
Les Français donneront au monde,
Et la paix et la liberté.
CHOEUR GÉNÉRAL.
La République,...
• La Marseillaise
Claude-Joseph Rouget de Lisle
25 avril 1792
Chant de guerre pour l'armée du Rhin
Aux armes, citoyens !
Formez vos bataillons !
Marchons, marchons !
Qu'un sang impur...
Abreuve nos sillons !
COUPLETS
Allons ! Enfants de la Patrie !
Le jour de gloire est arrivé !
Contre nous de la tyrannie,
L'étendard sanglant est levé ! (bis)
Entendez-vous dans les campagnes
Mugir ces féroces soldats ?
Ils viennent jusque dans vos bras
Égorger vos fils, vos compagnes.
Aux armes, citoyens ! etc.
Que veut cette horde d'esclaves,
De traîtres, de rois conjurés ?
Pour qui ces ignobles entraves,
Ces fers dès longtemps préparés ? (bis)
Français ! pour nous, ah ! quel outrage !
Quels transports il doit exciter ;
C'est nous qu'on ose méditer
De rendre à l'antique esclavage !
Aux armes, citoyens ! etc.
Quoi ! des cohortes étrangères
Feraient la loi dans nos foyers !
Quoi ! des phalanges mercenaires
Terrasseraient nos fiers guerriers ! (bis)
Dieu ! nos mains seraient enchaînées !
Nos fronts sous le joug se ploieraient !
De vils despotes deviendraient
Les maîtres de nos destinées !
Aux armes, citoyens ! etc.
Tremblez, tyrans et vous, perfides,
L'opprobre de tous les partis !
Tremblez ! vos projets parricides
Vont enfin recevoir leur prix. (bis)
Tout est soldat pour vous combattre.
S'ils tombent, nos jeunes héros,
La terre en produira de nouveaux
Contre vous, tous, prêt à se battre.
Aux armes, citoyens ! etc.
Français, en guerriers magnanimes
Portons ou retenons nos coups !
Épargnons ces tristes victimes,
A regret, s'armant contre nous ! (bis)
Mais ce despote sanguinaire !
Mais ces complices de Bouillé !
Tous ces tigres qui, sans pitié,
Déchirent le sein de leur mère !
Aux armes, citoyens ! etc.
Amour sacré de la Patrie
Conduis, soutiens nos bras vengeurs !
Liberté ! Liberté chérie,
Combats avec tes défenseurs ! (bis)
Sous nos drapeaux que la Victoire
Accoure à tes mâles accents !
Que tes ennemis expirants
Voient ton triomphe et notre gloire !
Aux armes, citoyens ! etc.
Peuple français, connais ta gloire ;
Couronné par l'Égalité,
Quel triomphe, quelle victoire,
D'avoir conquis la Liberté ! (bis)
Le Dieu qui lance le tonnerre
Et qui commande aux éléments,
Pour exterminer les tyrans,
Se sert de ton bras sur la terre.
Aux armes, citoyens ! etc.
Nous avons de la tyrannie
Repoussé les derniers efforts ;
De nos climats, elle est bannie ;
Chez les Français les rois sont morts. (bis)
Vive à jamais la République !
Anathème à la royauté !
Que ce refrain, partout porté,
Brave des rois la politique.
Aux armes, citoyens ! etc.
La France que l'Europe admire
A reconquis la Liberté
Et chaque citoyen respire
Sous les lois de l'Égalité ; (bis)
Un jour son image chérie
S'étendra sur tout l'univers.
Peuples, vous briserez vos fers
Et vous aurez une Patrie !
Aux armes, citoyens ! etc.
Foulant aux pieds les droits de l'Homme,
Les soldatesques légions
Des premiers habitants de Rome
Asservirent les nations. (bis)
Un projet plus grand et plus sage
Nous engage dans les combats
Et le Français n'arme son bras
Que pour détruire l'esclavage.
Aux armes, citoyens ! etc.
Oui ! déjà d'insolents despotes
Et la bande des émigrés
Faisant la guerre aux Sans-Culottes
Par nos armes sont altérés ; (bis)
Vainement leur espoir se fonde
Sur le fanatisme irrité,
Le signe de la Liberté
Fera bientôt le tour du monde.
Aux armes, citoyens ! etc.
O vous ! que la gloire environne,
Citoyens, illustres guerriers,
Craignez, dans les champs de Bellone,
Craignez de flétrir vos lauriers ! (bis)
Aux noirs soupçons inaccessibles
Envers vos chefs, vos généraux,
Ne quittez jamais vos drapeaux,
Et vous resterez invincibles.
Aux armes, citoyens ! etc.
COUPLET DES ENFANTS
Nous entrerons dans la carrière,
Quand nos aînés n'y seront plus ;
Nous y trouverons leur poussière
Et la trace de leurs vertus. (bis)
Bien moins jaloux de leur survivre
Que de partager leur cercueil
Nous aurons le sublime orgueil
De les venger ou de les survivre.
Aux armes, citoyens ! etc.
Enfants, que l'Honneur, la Patrie
Fassent l'objet de tous nos vœux !
Ayons toujours l'âme nourrie
Des feux qu'ils inspirent tous deux. (bis)
Soyons unis ! Tout est possible ;
Nos vils ennemis tomberont,
Alors les Français cesseront
De chanter ce refrain terrible :
Aux armes, citoyens ! ...
Louis Bouilhet (1821/1869).
Soldat libre.
Soldat libre, au léger bagage,
J'ai mis ma pipe à mon chapeau,
Car la milice où je m'engage
N'a ni cocarde ni drapeau.
La caserne ne me plaît guère,
Les uniformes me vont peu ;
En partisan je fais la guerre,
Et je campe sous le ciel bleu.
La Liberté, que l'on croit morte
Pour quelques heures de sommeil,
Près de moi se chauffe à la porte
De ma tente ouverte au soleil.
Je suis sourd au clairon d'un maître,
La consigne expire à mon seuil ;
Nul, hormis Dieu, ne peut connaître
Ce grand secret de mon orgueil.
Parmi les champs de poésie
Je fourrage, sans mission ;
Le capitaine est Fantaisie,
Le mot du guet Occasion ;
Et, loin de la poussière aride
Où sont marqués les pas humains,
Je cours, sur un cheval sans bride,
Dans des campagnes sans chemins !...
Pierre Dac (1893/1975).
Noël 41.
Ce fut un réveillon étrange
Que celui de 41,
Du pain, du rancho, une orange
En composaient tout le festin.
Loin de tous ceux que mon coeur aime,
En la morne nuit des prisons
J'ai cependant vécu le thème
De la plus belle des chansons.
Sur mon pain j'ai mis l'espérance!
Et mon pain prit soudainement
L'aspect du beau pain blanc de France
Qui fut le nôtre si longtemps.
Dans mon rancho j'ai mis l'Histoire
Que nous vivons en ce moment
Et c'est le goût de la victoire
Qu'il prit alors subitement.
De ma simple et moche orange
J'ai distillé le jus grisant
De la liberté sans mélange
Qui nous appelle et nous attend.
Ce fut un réveillon étrange
Que celui de 41,
Du pain, du rancho, une orange
En composaient tout le festin.
Bertolt Brecht (1898/1956).
Mon général, votre tank est si solide !
Il couche une forêt, il écrase cent hommes.
Mais il a un défaut :
il a besoin d'un mécanicien.
Mon général, votre bombardier
est si puissant !
il vole plus vite que l'orage
et transporte plus qu'un éléphant.
Mais il a un défaut :
il a besoin d'un pilote.
Mon général, l'homme est très utile !
Il sait voler, il sait tuer.
Mais il a un défaut:
il sait penser.
Sigsaly, émetteur récepteur avec système de brouillage.
(Churchill en disposa dès l'automne 1941 pour dialoguer avec Roosevelt).
Jean-Baptiste Clément (1836/1903).
Le temps des cerises.
Quand nous chanterons le temps des cerises
Et gai rossignol et merle moqueur
Seront tous en fête.
Les belles auront la folie en tête
Et les amoureux du soleil au coeur...
Quand nous chanterons le temps des cerises
Sifflera bien mieux le merle moqueur.
Mais il est bien court, le temps des cerises
Où l'on s'en va deux cueillir en rêvant
Des pendants d'oreilles!
Cerises d'amour, aux robes pareilles,
Tombant sous la feuille en gouttes de sang!...
Mais il est bien court, le temps des cerises
Pendants de corail qu'on cueille en rêvant!
Quand nous en serons au temps des cerises,
Si vous avez peur des chagrins d'amour,
Évitez les belles.
Moi qui ne crains pas les peines cruelles,
Je ne vivrai point sans souffrir un jour...
Quand nous en serons au temps des cerises,
Vous aurez aussi vos peines d'amour.
J'aimerai toujours le temps des cerises
C'est de ce temps-là que je garde au coeur
Une plaie ouverte.
Et Dame Fortune en m'étant offerte
Ne pourra jamais fermer ma douleur...
J'aimerai toujours le temps des cerises
Et le souvenir que je garde au coeur.
Aragon
Ils chantaient sous les balles
Et s'il était à refaire
Je referais ce chemin
Une voix monte des fers
Et parle des lendemains
On dit que dans sa cellule
Deux hommes cette nuit-là
Lui murmuraient Capitule
De cette vie es-tu las
Tu peux vivre tu peux vivre
Tu peux vivre comme nous
Dis le mot qui te délivre
Et tu peux vivre à genoux
Et s'il était à refaire
Je referais ce chemin
La voix qui monte des fers
Parle pour les lendemains
Rien à faire. Alors qu'ils partent
Sur lui retombe son sang
C'était son unique carte
Périsse cet innocent
Et si c'était à refaire
Referait-il ce chemin
La voix qui monte des fers
Dit je le ferai demain
Ils sont venus pour le prendre
Ils parlent en allemand
L'un traduit Veux-tu te rendre
II répète calmement
Et si c'était à refaire
Je referais ce chemin
Sous vos coups chargés de fer
Que chantent les lendemains
II chantait lui sous les balles
Des mots sanglant est levé
D'une seconde rafale
II a fallu l'achever
Une autre chanson française
A ses lèvres est montée
Finissant la Marseillaise
Pour toute l'humanité.
Ils chantaient sous les balles
Et s'il était à refaire
Je referais ce chemin
Une voix monte des fers
Et parle des lendemains
On dit que dans sa cellule
Deux hommes cette nuit-là
Lui murmuraient Capitule
De cette vie es-tu las
Tu peux vivre tu peux vivre
Tu peux vivre comme nous
Dis le mot qui te délivre
Et tu peux vivre à genoux
Et s'il était à refaire
Je referais ce chemin
La voix qui monte des fers
Parle pour les lendemains
Rien à faire. Alors qu'ils partent
Sur lui retombe son sang
C'était son unique carte
Périsse cet innocent
Et si c'était à refaire
Referait-il ce chemin
La voix qui monte des fers
Dit je le ferai demain
Ils sont venus pour le prendre
Ils parlent en allemand
L'un traduit Veux-tu te rendre
II répète calmement
Et si c'était à refaire
Je referais ce chemin
Sous vos coups chargés de fer
Que chantent les lendemains
II chantait lui sous les balles
Des mots sanglant est levé
D'une seconde rafale
II a fallu l'achever
Une autre chanson française
A ses lèvres est montée
Finissant la Marseillaise
Pour toute l'humanité.
C'est au cimetière d'Ivry
Qu'au fond de la fosse commune
Dans l'anonyme nuit sans lune
Repose Gabriel Péri
Pourtant le martyr dans sa tombe
Trouble encore ses assassins
Miracle se peut aux lieux saints
Où les larmes du peuple tombent
Dans le cimetière d'Ivry
Ils croyaient sous d'autres victimes
Le crime conjurant le crime
Etouffer Gabriel Péri
Le bourreau se sent malhabile
Devant une trace de sang
Pour en écarter les passants
Ils ont mis des gardes mobiles
Dans le cimetière d'Ivry
La douleur viendra les mains vides
Ainsi nos maîtres en décident
Par peur de Gabriel Péri
L'ombre est toujours accusatrice
Où dorment des morts fabuleux
Ici des hortensias bleus
Inexplicablement fleurissent
Dans le cimetière d'Ivry
Dont on a beau fermer les portes
Quelqu'un chaque nuit les apporte
Et fleurit Gabriel Péri
Un peu de ciel sur le silence
Le soleil est beau quand il pleut
Le souvenir a les yeux bleus
A qui mourut par violence
Dans le cimetière d'Ivry
Les bouquets lourds de nos malheurs
Ont les plus légères couleurs
Pour plaire à Gabriel Péri
Ah dans leurs pétales renaissent
Le pays clair où il est né
Et la mer Méditerranée
Et le Toulon de sa jeunesse
Dans le cimetière d'Ivry
Les bouquets disent cet amour
Engendré dans le petit jour
Où périt Gabriel Péri
Redoutez les morts exemplaires
Tyrans qui massacrez en vain
Elles sont un terrible vin
Pour un peuple et pour sa colère
Dans le cimetière d'Ivry
Quoi qu'on fasse et quoi qu'on efface
Le vent qui passe aux gens qui passent
Dit un nom Gabriel Péri
Vous souvient-il ô fusilleurs
Comme il chantait dans le matin
Allez c'est un feu mal éteint
Il couve ici mais brûle ailleurs
Dans le cimetière d'Ivry
Il chante encore il chante encore
Il y aura d'autres aurores
Et d'autres Gabriel Péri
La lumière aujourd'hui comme hier
C'est qui la porte que l'on tue
Et les porteurs se substituent
Mais rien n'altère la lumière
Dans le cimetière d'Ivry
Sous la terre d'indifférence
Il bat encore pour la France
Le coeur de Gabriel Péri.
• Fleur de Paris
Paroles de M.Vandaire- Musique de H.Boutayre
Maurice Chevalier - 1944
C'est une fleur de Paris
Du vieux Paris qui sourit
Car c'est la fleur du retour
Du retour des beaux jours
Pendant quatre ans dans nos cœurs
Elle a gardé ses couleurs
Bleu, blanc, rouge
Avec l'espoir elle a fleuri
Fleur de Paris
Le paysan la voyait fleurir dans ses champs
Le vieux curé l'adorait dans un ciel tout blanc
Fleur d'espérance
Fleur de bonheur
Tous ceux qui se sont battus pour nos libertés
Au petit jour, devant leurs yeux l'ont vu briller
La fleur de France
Aux trois couleurs
C'est une fleur de chez nous
Elle a fleuri de partout
Car c'est la fleur du retour
Du retour des beaux jours
Pendant quatre ans dans nos cœurs
Elle a gardé ses couleurs
Bleu, blanc, rouge
Elle était vraiment avant tout
Fleur de chez nous !
largage de fines bandes d'aluminium dans le ciel pour brouiller les radars allemands
Sons
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15