Portraits
Né le 24 novembre 1920 près
du Havre, Jean-Marie Maridor débute dans la vie professionnelle comme
apprenti coiffeur. Son métier ne l'empêche toutefois pas de passer son brevet
grâce à l'aviation populaire. Il décroche le 1er degré à l'âge
de 16 ans, ce qui en fait le plus jeune pilote de tourisme de France. En mai
1939, il est reçu au concours d'entrée à l'école d'Istres. Mais la guerre
menace.
Le 30 août 1939, délaissant peignes et ciseaux, il s'engage pour cinq ans dans
l'armée de l'Air. Envoyé à l'école de pilotage d'Angers, il passe avec succès
son brevet militaire en janvier 1940. Il est désigné pour suivre le stage de
formation à la chasse à Étampes, avec le grade de caporal-chef. Replié à La
Rochelle avec son école, il suit les Polonais jusqu'à St Jean-de-Luz et
s'embarque avec plusieurs de ses camarades à destination de l'Angleterre. Il
s'enrôle dans les FAFL le 27 juin 1940 sous le pseudonyme de Jones (30.114). Il
est nommé sergent en octobre.
Après le passage obligé en OTU, fin août 1941, il est affecté au N° 615 Squadron
à Manston. Le 15 décembre 1941, il est promu officier. En février
1942, il passe au N° 91 Squadron, Plutôt solitaire et renfermé, il
fraie peu avec les autres Français de son unité. Ceux-ci, d'ailleurs, ne font
rien pour l'admettre dans leur cercle et, lorsque la création du N° 340 Squadron
Île-de-France est annoncée, il est le seul à ne pas vouloir y être
affecté.
À de nombreuses reprises, poussant ses attaques à fond, il rentre dans un
avion en dentelles. Le 11 mars 1942, l'explosion des chaudières du bateau sur
lequel il a ouvert le feu endommage son appareil au point qu'il doit se poser en
catastrophe. Dans le crash, il est blessé au visage. Le 29 mars, il est
touché par un navire-DCA et doit sauter en parachute. Le 23 mai, il est blessé
au bras au cours d'un combat engagé, par méprise, contre des chasseurs
canadiens. Il est nommé lieutenant en septembre 1942.
En 1943, son unité est transformée sur Spitfire Mk. XII à moteur
Griffon. Il est promu capitaine le 15 juin 1943. En janvier 1944, Jean-Marie
Maridor, épuisé physiquement et nerveusement, est envoyé au repos comme
instructeur au 61 OTU. À son retour, en mars 1944, il retrouve le N° 91 Squadron,
qui, en juin 1944, est lancé à la chasse aux V-1. Il en abat personnellement
onze, mais le dernier lui sera fatal.
Le 3 août 1944, il poursuit l'un de ces drones qui brutalement amorce son piqué
droit sur la Benenden School, servant alors d'hôpital militaire. Jean-Marie
Maridor rattrape l'engin et, pour être sûr de ne pas le rater, s'approche le
plus près possible avant d'ouvrir le feu. Son avion est volatilisé dans
l'explosion du V-1. Jean-Marie Maridor devait se marier le 10 août.
Administrateur et homme politique français (Béziers, 1899 — en déportation, 1943).
Fondateur du Conseil national de la Résistance (1943).
Chronologie (1943) : Assassinat de Jean Moulin par la Gestapo
Après avoir servi dans le génie durant les derniers mois de la Première Guerre mondiale, Jean Moulin entra dans la carrière administrative en 1919; il devint chef de cabinet du préfet de la Savoie en 1922, sous-préfet en 1930. Chef de cabinet civil de Pierre Cot, ministre de l'Air du Front populaire, plus jeune préfet de France en 1937, nommé à Rodez où il restera peu de temps, il devint préfet d'Eure-et-Loir en 1939. Le 17 juin 1940, lors de l'entrée des troupes allemandes dans Chartres, il refusa de signer un texte que lui présentaient des officiers allemands, imputant à des troupes françaises – des tirailleurs sénégalais – des violences commises sur des femmes et des
enfants ; battu, il préféra se taillader la gorge plutôt que de signer – l'écharpe qu'il porta dès lors servait à masquer sa cicatrice. Les Allemands ayant demandé son renvoi, il fut révoqué le 2 novembre 1940 par le gouvernement de Vichy. Il entreprit alors de son propre chef plusieurs voyages en zone Sud, avant de gagner Londres en 1941, où il rencontra le général de Gaulle qui le chargea de coordonner en zone non occupée les divers réseaux qui constituaient la Résistance intérieure, et de lier celle-ci à la France libre de Londres.
Parachuté en France le 1er janvier 1942, puis, après un retour à Londres, de nouveau en septembre de la même année, Jean Moulin – connu sous les pseudonymes de
" Max " ou de " Rex " – rencontra tous les dirigeants de la Résistance, mais il se heurta à ceux qui craignaient sa tendance à centraliser renseignements, communications, moyens et argent, d'une part, et qu'il ne reconstitue les partis politiques tels qu'ils étaient avant Vichy, d'autre part. À Henri Frenay, soucieux de ce que les mouvements de résistance conservent une stricte indépendance et n'apparaissent pas comme des organismes aux ordres de De Gaulle, Moulin répond qu'
" il n'est pas question de porter atteinte à l'indépendance des mouvements
" – ce qui n'empêchera pas Frenay d'écrire, plus tard, que Moulin était un
" crypto-communiste ", voire " le fossoyeur de la Résistance
", s'appuyant pour l'essentiel sur son passage au cabinet de Pierre Cot et le fait que nombre de ses proches se révélèrent, à la Libération, comme étant communistes. Jean Moulin réussit cependant à établir une ligne minimale d'action commune, en accord avec Londres, et parvint, le 15 mai 1943, à donner corps à son action fédératrice en créant le Conseil national de la Résistance (CNR), dont il devint le premier président.
Dans cet organisme complexe, se trouvaient représentés divers mouvements de la Résistance (Combat, Franc-Tireur, Libération…), des partis politiques maintenus ou reconstitués dans la clandestinité (parti communiste, parti socialiste SFIO, parti radical, démocrates populaires, etc.) ainsi que les centrales syndicales (CFTC, CGT réunifiée après la réconciliation des compagnons de Jouhaux avec les communistes exclus en 1939).
Sous l'impulsion de Jean Moulin, le CNR établit un programme d'épuration et de reconstruction pour la France libérée. Né de l'esprit de la Résistance, ce programme portait la marque de préoccupations sociales avancées. Sur le plan militaire, le CNR se dota d'organes d'exécution unifiés, notamment le Comac (Comité d'action militaire) pour coordonner les opérations de résistance armée. Le CNR demanda également la formation d'un gouvernement provisoire, à Alger, placé sous la présidence de De Gaulle seul, le général Giraud ne devant recevoir qu'un commandement militaire, ce qui contribua à asseoir la légitimité politique de De Gaulle face aux Alliés, et notamment à Roosevelt.
Le 21 juin 1943, Jean Moulin, probablement trahi, fut arrêté à Caluire-et-Cuire (Rhône) par la Gestapo de Lyon dirigée par Klaus Barbie. Torturé, il mourut peut-être au cours de son transfert en Allemagne. La trahison de Caluire reçut diverses interprétations. Selon certains – notamment le général Delestraint, arrêté quelques jours plus tôt à Paris –, le responsable des arrestations de Caluire serait René Hardy, responsable de Résistance-Fer
; cependant, l'innocence de ce dernier fut reconnue à deux reprises par les tribunaux. D'autres ont voulu voir le traître en Frenay, qui dut se défendre jusqu'à sa mort de violentes campagnes dirigées contre lui. Certains ont cherché à étayer la thèse de Moulin en relations suivies avec les Américains, et involontairement trahi par un de leurs agents. Une autre thèse prétend que le piège de Caluire n'était pas destiné à Jean Moulin, et que seul un funeste hasard l'y a précipité – cette thèse s'appuie notamment sur les horaires d'arrivée des résistants et des membres de la Gestapo, et le temps que Barbie mit à identifier l'un de ses prisonniers comme étant Jean Moulin. Enfin, même le lieu de sa mort reste incertain.
Le successeur de Jean Moulin à la tête du CNR fut Georges Bidault, un des fondateurs du Mouvement républicain populaire (MRP). En 1964, en témoignage de la reconnaissance nationale à l'un des principaux artisans de la Libération, les cendres de Jean Moulin furent transférées au Panthéon, au cours d'une cérémonie solennelle présidée par André Malraux.
Historien français (Lyon, 1886 - Saint-Didier-de-Formans, Ain, 1944).
Fondateur avec Lucien Febvre de la revue des Annales d'histoire économique et sociale (1929), Marc Bloch se consacre d'abord à l'étude du Moyen Âge avec sa thèse, les Rois thaumaturges (1924), un essai (Caractères originaux de l'histoire rurale française, 1931) et son ouvrage majeur, la Société féodale (1939-1940). Il est l'un des pionniers de l'histoire non événementielle, et propose, tant dans les Annales que dans un essai, Apologie pour l'histoire (publié après sa mort, en 1949), une méthode originale pour la recherche historique, qui associe les autres sciences humaines en un travail de synthèse permettant d'inscrire l'événement, jusqu'alors privilégié par les historiens, dans son contexte économique, politique et culturel. En 1936, il est nommé professeur à la Sorbonne. Homme de conviction, il rejoint en 1942 la Résistance. Arrêté, il est fusillé par les nazis en 1944.